« J’oublie le sentiment de tristesse »

16 octobre 2019 – Fatima*, 25 ans, écrit la lettre « e » sur son ardoise, lors d’une séance d’alphabétisation au siège de l’Association des Femmes Leaders de Bria, dans le centre de la RCA. © Aurélie Godet / Oxfam RCA

16 octobre 2019 – Fatima*, 25 ans, écrit la lettre « e » sur son ardoise, lors d’une séance d’alphabétisation au siège de l’Association des Femmes Leaders de Bria, dans le centre de la RCA. © Aurélie Godet / Oxfam RCA

Trois fois par semaine, Fatima*, 25 ans, se rend au siège de l’Association des Femmes Leaders de Bria pour suivre des séances d’alphabétisation. Elle fait partie des 100 personnes survivantes d’incidents de protection qui participent à ce programme Oxfam de trois mois, à l’issue duquel elle recevra un kit et une formation pour lancer un petit commerce. Elle raconte.

« J’élève seule mes quatre enfants depuis que mon mari est parti rejoindre un groupe armé lors des événements de mai 2017 à Bria.

Pour nourrir ma famille, je pars en brousse chercher des fagots et je les revends. Je peux gagner environ 2 000 francs par jour (3 euros). Ce n’est pas suffisant, et surtout c’est dangereux de se promener seule sur les chemins.

Il y a deux mois, des éléments armés m’ont stoppée sur la route. L’un d’eux m’a violée.

J’ai été prise en charge et amenée à l’hôpital. Puis Oxfam m’a proposé de participer à un programme d’alphabétisation. Petite, mes parents m’envoyaient au marché avec mes sœurs. Je regrette de ne jamais être allée à l’école. Je vais tout faire pour que mes enfants apprennent à lire et écrire. Il faut avoir un travail décent !

Mais ce que je préfère avec les cours, c’est que j’oublie le sentiment de tristesse. J’échange avec des musulmanes et des chrétiennes. Je ne me sens plus seule. »

Fatima et les autres bénéficiaires de ce programme d’alphabétisation sont loin d’être les seuls touchés par les violences en RCA. Dans ce pays de 4,9 millions d’habitants qui a basculé dans la violence en 2013, les civils paient le prix fort. Un incident de violence basée sur le genre est reporté toutes les 60 minutes, et 92% des victimes sont des femmes ou des filles.

C’est un programme Oxfam en partenariat avec l’Association des Femmes Leaders de Bria. Il est financé par le Fonds Humanitaire et est réparti dans trois centres d’alphabétisation de Bria, dont un sur le site des déplacés de PK3. Face à l’importance des besoins, Oxfam appelle la communauté internationale et les bailleurs à poursuivre leurs efforts et financer d’urgence la réponse humanitaire en RCA.

* Le nom a été changé dans le texte

Publié le 29/11/2019.