Camille Ngouvela : « Trouver à manger est difficile car les prix ont augmenté à cause du coronavirus »

Camille arrose les cultures de son groupement maraîcher sur le site des personnes déplacées de PK3 à Bria, dans le centre de la RCA. © Aurélie Godet/Oxfam RCA

Camille arrose les cultures de son groupement maraîcher sur le site des personnes déplacées de PK3 à Bria, dans le centre de la RCA. © Aurélie Godet/Oxfam RCA

"Sur le site des déplacés, nous nous attendons au pire."

Je m’appelle Camille NGOUVELA, j’ai 46 ans.

Je vis sur le site de déplacés PK3 de Bria [ndlr : dans le centre de la RCA, environ 50 000 personnes vivent sur le site de déplacés PK3 de Bria, c’est le plus peuplé du pays]. J’ai une femme, deux filles et deux garçons. La vie sur le site est difficile. C’est grâce aux activités maraîchères appuyées par Oxfam que nous avons de quoi nous nourrir.

J’ai quitté la ville de Bria en 2017 pour venir m’installer sur le site de PK3 avec ma femme et mes quatre enfants. De mon quartier, il ne reste plus rien aujourd’hui. Je suis le délégué technique d’un groupement maraîcher sur le site PK3. C’est un rôle important, car je montre aux autres comment faire des pépinières sur le terrain. J’ai été formé par Oxfam en technique culturale et en itinérance technique. Je suis fier de moi, c’est la première fois que je m’occupe d’un jardin maraîcher. Avant, je cultivais le manioc et l’arachide dans mon champ.

Avec les cas confirmés de coronavirus à Bria [ndlr: 11 cas confirmés au 25 juin 2020], notre communauté est traumatisée. Sur le site des déplacés, nous nous attendons au pire.

Nous sommes dans une période difficile, et elle va durer au moins jusqu’aux prochaines récoltes, en octobre. En plus, trouver à manger est difficile car les prix ont augmenté à cause du coronavirus avec la restriction des mouvements et la fermeture des frontières. Et comme je vis sur le site des déplacés, impossible de faire des stocks !

Avec le coronavirus, les revenus de la famille ont diminué. C’est avec les activités maraîchères, et le petit commerce de ma femme, que nous parvenons à manger. Mais depuis qu’il y a le coronavirus, par exemple ma femme ne va plus travailler au marché car elle a peur de contracter la maladie. Nous essayons de nous protéger en nous lavant les mains avec du savon et en respectant la distanciation sociale, mais ce n’est pas facile.

Oxfam soutient les groupements maraîchers du site des personnes déplacées de PK3 à Bria depuis 2017, dans le centre de la RCA. © Aurélie Godet/Oxfam RCA 

Depuis qu’il y a le coronavirus, toutes les denrées sont chères. Il n’y a pas assez d’acheteurs pour ce que nous produisons au jardin maraîcher.

Ma famille reste chez elle et évite les déplacements. Nous mangeons toujours ensemble, mais quand un parent qui n’est pas de notre concession vient manger, on lui donne à part. C’est la saison pluvieuse, alors nous mangeons des légumes et des feuilles vertes que nous produisons. Ce qui change, c’est que le manioc coûte cher ! Nous avons de la sauce pour une quantité insignifiante de boule de manioc. Nous mangeons une fois par jour.

Ce qui m’a plu avec le projet Oxfam, ce sont les semences, les outils et les formations. Cela nous a beaucoup aidés et c’est grâce à cela que nous parvenons à nourrir notre famille.

Actuellement nous avons des légumes sur les planches, nous consommons et nous vendons aussi.

Pour l’avenir, j’ai un grand projet de maraîchage ! Depuis que j’ai reçu une formation avec Oxfam, j’aimerais aménager une superficie d’un demi-hectare pour cultiver des légumes. J’espère qu’Oxfam pourra m’appuyer.

Il faut veiller sur les activités agricoles et maraîchères, car sans ces deux choses la vie n’a pas de sens !

La réponse d'oxfam

La République centrafricaine (RCA) se classe au dernier rang sur 117 dans l'indice de la faim dans le monde, avec une personne sur deux en situation d'insécurité alimentaire et près de 1 million de personnes estimées au bord de la famine. La rareté des ressources alimentaires est une cause et une conséquence des conflits. Des milliers d'agriculteurs ont été contraints d'abandonner leurs fermes ou de regarder leurs récoltes et leur bétail brûler. Les Casques bleus doivent surveiller les femmes qui ramassent du bois et de l'eau pour subvenir aux besoins de leur famille.

La pandémie de coronavirus aggrave encore cette double crise. La réduction des transports et la fermeture partielle des frontières avec le Cameroun et la République démocratique du Congo ont entraîné une flambée des prix des produits alimentaires importés - le coût du riz et des haricots a augmenté de 80% depuis l'année dernière. Les produits de production locale, tels que le maïs, le manioc et le sorgho, ont également augmenté de près de 50 % en avril par rapport au même mois l'an dernier.

Oxfam a intensifié ses opérations en RCA pour répondre à la crise du COVID-19, aidant ainsi plus de 54 000 personnes avec de la nourriture et des semences, ainsi que des masques en savon et en tissu.

A Bria, au centre de la RCA, Camille Ngouvela est le délégué technique d'un groupe maraîcher. Il bénéficie de l’aide d’Oxfam pour les semences, les outils et les formations. Créé en décembre 2017, le groupe a la particularité d'être situé sur le site PK3 de Bria, le site de déplacés le plus peuplé du pays (50 000 personnes). Un projet soutenu par l'Union européenne (ECHO).